Mon histoire avec Budapest commence le dimanche 2 août 1981 lorsque j’embarque dans le train de 23h15 à la gare de l’Est à Paris. À l’époque la gestion des transports était rationnelle, vous n’aviez pas à changer de wagon pour Budapest, c’était direct. Le trajet durait 21h15 mais ne semblait pas si long vu que la première partie était en couchette et qu’après vous pouviez admirer les beaux paysages, assister à la reformation du train à Salzbourg, vous dégourdir les jambes durant 2 heures et demi à Vienne et subir le folklore douanier pendant plus d’une heure à Hegyeshalom.
Donc me voilà parti. Il fait un temps épouvantable sur Paris. Je prépare ma couchette et tente de dormir. Ce voyage je le ferai une vingtaine de fois avant d’opter pour l’avion. Il pleut sur l’Allemagne. Une éclaircie fugace apparaît à Salzbourg. Je change de compartiment pour me retrouver parmi des Autrichiennes en costume local. Une nouveauté pour moi. L’une d’elle maîtrise le français, elle est antiquaire à Vienne. Le ciel se couvre à nouveau. Puis c’est l’attente à Vienne. Le train est reconstitué. Nous changeons de voie. Enfin à 16h30 nous repartons. Peu après Vienne le ciel passe du gris foncé à un blanc vaporeux laissant timidement filtrer une apaisante lumière. C’est presque féérique. Arrivé à Hegyeshalom c’est le cinéma des hommes en armes, du contrôle des visas et je ne sais quoi encore. Cela dure une heure. Sûr qu’un tel système réduit à 0 l’immigration d’autant que je devais me faire déclarer à la police dans les 48h sous peine d’amende (100 forints par jour de retard); la durée de séjour ne pouvant excéder trois mois. Vers 18h30 le train repart. Il reste deux heures de trajet avant Budapest. À peine reparti j’observe un phénomène étonnant : le ciel aux nuages cotonneux s’arrête brusquement pour devenir bleu, comme si quelqu’un avait tracé un trait rectiligne, comme si je passais dans un monde nouveau plus serein.
Le lendemain mardi 4 août 1981 il fait si froid que je dois remettre un pull et puis c'est le miracle, en moins de 48 heures la température monte spectaculairement. Ciel bleu et chaleur torride marqueront mon séjour.
La personne chez qui je loge (ma future femme en fait) habite à quelques dizaines de mètres de Rozsavölgyi, alors meilleur disquaire de Budapest. Un amateur de musique ne pouvait pas mieux tomber.
La Hongrie va modifier ma vie privée. Le déclic se produira à Esztergom mais ça c'est mon secret.
Un soir de ce chaud mois d'août 1981, sur les marches près du pont Elisabeth, je me suis déchaussé et me suis trempé les pieds dans le Danube. Pas une salissure, pas une allergie mais une expérience que je ne referais pas aujourd'hui.
Tout était pur et authentique en ce temps. Le village de Szentendre (30 kms de Budapest) avait un charme fou avant que le business, les tageurs et les intempéries ne l'altèrent sans compter les restaurations contestables (voir ci-dessous).
La patine du temps de ce mur aux pierres et briques bien agencées fleure bon le passé.
Le nouveau mur au premier plan est une copie aseptisée
L'intérieur de la belle boutique de Noël à Szentendre |